FORUM - Voisinage
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Bonjour,
Depuis 7 ans j'ai une propriété en zone rurale composée de deux parcelles attenantes: A (sur laquelle est sise ma maison), et B (un chemin, créé en 1995 par division d'une ancienne parcelle Z), au sud de A. Toutes les propriétés du quartier, dont A et Z étaient accessible par un étroit chemin communal. Bien que toujours cadastré, ce chemin n'est quasiment plus visible, et donc non carrossable, s'il l'a jamais été.
Vers 1950, un nouvel accès desservant A et d'autres parcelles a été créé via plusieurs parcelles dont la parcelle C d'un voisin, qui est mitoyenne à l'Est de A, mais sans qu'un acte de servitude de passage ne soit établi. Il est à noter que A et C sont issues à l'origine d'une même propriété. D'autre part, ce nouvel accès est très raide et difficile à maintenir carrossable car non goudronné.
En 1982, une servitude de passage a été créée pour l'utilisation d'un autre chemin, via la parcelle D d'un autre voisin, au bénéfice de plusieurs parcelles dont Z.
En 1995, le propriétaire de la parcelle Z la divise, créant la parcelle B pour former un chemin desservant A et C, et la vends au propriétaire de A. Les fonds A et C ont maintenant deux accès: l'ancien difficile à utiliser et sans acte de servitude, et le nouveau via D. Le même jour, une servitude de passage est créée sur cette nouvelle parcelle B, au bénéfice de C et du reste de l'ancienne parcelle Z. L'accès à ma maison sur A s'est fait depuis exclusivement par-là, et les servitudes de 1982 et 1995 sont reprises dans mon acte de propriété.
Maintenant, le propriétaire de D déclare que l'acte de servitude de 1982 n'incluant pas les parcelles A et C comme fonds dominant, le propriétaire de Z n'avait pas le droit d'aggraver la servitude sur D en l'étendant à des fonds additionnels (A et C) par l'acte de 1995. Il me conteste donc le droit de passer sur D pour aller jusqu'à A.
Question: Le notaire a-t-il commis une faute en 1995 en établissant un acte aggravant une servitude (sur D), sans l'accord du propriétaire du fond servant? En d'autres termes en créant une servitude qui n'est pas utilisable car n'incluant pas l'accord des propriétaires des fonds précédemment traversés?
Merci pour avoir pris la peine de lire mon long exposé, et pour votre avis.
Paul
Merci Alix,
Merci pour votre réponse et éclairage. Effectivement la CA de Montpellier confirme qu'il y avait aggravation de la servitude, non autorisée. L'arrangement avec le voisin n'a pas aboutit pour l'instant, et ce malgrès une réunion avec le notaire (maintenant à la retraite) qui a établi l'acte de 1995. En préliminaire à un arrangement amiable sans faire recours au juge, il faudrait clarifier et s'accorder sur les droits de chacun. C'est leur application qui ensuite fera l'objet de négociation.
La position de D est claire: j'ai droit de passer sur son terrain pour aller à B, mais pas pour continuer jusqu'à A. Mais aurait-il le droit de m'empécher physiquement de passer sur D (barrière) au motif que je vais au dela de B?
Le problème de fond (sans jeu de mot) est que j'ai acheté un bien, en lisant soigneusement mon acte qui me donnait (ainsi qu'à mon voisin C) un droit de passage, et que ce droit est en fait inutilisable. Sans cet accès, le bien acheté a une valeur moindre car l'ancien accès par C est quasiment impraticable.
La faute du notaire me crée donc un préjudice, et à mon avis sa responsabilité (ou celle de sa SCP) est/ était engagée.
Concernant la prescription, je lis: "La prescription d'une action en responsabilité ne court qu'à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance. Voir : C. cass. 1ère ch. civ. 11 mars 2010 (pourvoi n°09-12710) et Cass. civ. 1ère 25 mars 2010 (pourvoi n°09-15517)". J'en déduit que la prescription court non pas à partir de 1995 mais du moment ou j'ai eu "connaissance du dommage", ce qui est en Octobre 2010 quand D m'a fait découvrir les problèmes dans mon acte.
La question serait si le fait de signer mon acte lors de l'achat en 2004 me donnait "connaissance du dommage", ce qui amènerait la fin de la prescription en 2009.
Meme s'il y avait prescription, il me semble que la SCP du notaire devrait faire une analyse de la situation et proposer aux parties une solution. Sans droit de passage utilisable je suis enclavé, et au vu de la disposition des lieux et de l'historique des divisions successives de propriétés et du déplacement de l'accès public, il n'est pas facile d'identifier quels fonds me devrait une servitude légale si D continue à refuser d'étendre à A la seritude conventionelle qui existe déjà pour B.
Merci pour vos commentaires.
Bonjour,
Pour moi, le dommage est réalisé dès lors que vous avez acquis la parcelle B et utilisé l'accès D sans en avoir obtenu le droit de passage, même si les conséquences du dommage ne sont apparues que plus tard, sauf si vous êtes en mesure de prouver que vous n'aviez pas eu connaissance du dommage avant octobre 2010.
La responsabilité du notaire est d'autant moins aisée à établir qu'il existe un ancien accès qui, bien que difficile d'accès, est quand même pratiquable et que ce droit d'accès, même non formalisé, peut être considéré comme acquis par le biais de la prescription acquisitive trentenaire.
Cela dit, vous pouvez bien sûr tenter de mettre en cause la responsabilité du notaire pour l'obliger à jouer un rôle d'amiable compositeur entre les deux parties, peut-être cela suffira à débloquer la situation.
Sachez que je ne suis pas un spécialiste en responsabilité civile des notaires, en cas de doute, n'hésitez pas à consulter un avocat ou un autre notaire.
Bien cordialement.
Bonjour Paul,
La règle de l'indivisibilité de la servitude édictée par l'article 700 du Code civil ne permet pas de faire supporter au fonds servant une charge nouvelle résultant de l'adjonction au fonds dominant d'une nouvelle parcelle étrangère à la servitude. Le rattachement à la parcelle visée par l'acte constitutif d'une parcelle non visée par l'acte constitutif ne peut donc avoir pour conséquence d'étendre à cette dernière le bénéfice de la servitude, une telle extension étant constitutive d'une aggravation de la condition du fonds servant prohibée par l'article 702 du Code Civil (Cour d'appel de Montpellier, 1re Chambre, sect. A2, 14 novembre 2006 (R.G. n° 05/04.873)
En clair, ton voisin est dans son droit de contester le droit de passer par D pour aller vers A car il y a en effet aggravation de la servitude pesant sur le fonds servant.
Visiblement, la responsabilité du notaire est engagée. Mais ce qui peut poser problème, c'est la prescription du fait que l'acte de constitution de la servitude date de 1995.
Essaies donc de trouver un arrangement avec ton voisin.
Bonne journée et bon courage pour la suite.
Cordialement.